Caraïbes et Océan indien

L’évolution du drapeau d’Haïti, reflet d’une histoire mouvementée

À l'origine, un drapeau est une pièce d'étoffe attachée à une hampe, qui permet d’identifier un groupe ou un pays. Il symbolise, grâce à l’emblème qui y est représenté et grâce au choix des couleurs, les valeurs que se donne une nation. Première République noire - le général Dessalines, ayant chassé les Français, proclame son indépendance en 1804 -, les changements de drapeau d’Haïti sont l’illustration des interrogations identitaires du pays

Lunise Marquis

Publié le 15 septembre 2006

Le roi Charles X reconnaît l’indépendance d’Haïti le 17 avril 1825, à la condition que le gouvernement haïtien paie en cinq ans une indemnité de cent cinquante millions de francs. L’indemnité est réduite ensuite à soixante millions de francs ainsi l’indépendance d’Haïti est reconnue sans conditions par la France.
En 1843, Boyer, est renversé et s’exile en France. En 1844, les Dominicains se soulèvent contre Haïti. L’île est de nouveau coupée en deux entités distinctes, et dès lors définitivement.


Empire d’Haïti (1849-1860)

Après le départ de Boyer, le pouvoir est confié à un gouvernement provisoire. Le 1er mars 1847, Faustin Soulouque est élu président de la république. Il transforme Haïti en Empire le 25 août 1849 et se fait appeler Faustin 1er. Le sacre n’a lieu que le 18 avril 1852. Pour consolider sa dictature, il s’appuie sur les Etats-Unis et les puissances européennes. Lors d’un soulèvement, il s’exile le 15 janvier 1859. Le même jour, le comité révolutionnaire des Gonaïves proclame la suppression de l’Empire et le rétablissement de la République.


République d’Haïti (1860-1964)

Nicolas Fabre Geffrard est proclamé président à vie par le comité des Gonaïves le 15 janvier 1859. L’œuvre législative du gouvernement est importante, amélioration du code civil, du code pénal et du code rural. Il réorganise l’enseignement supérieur et fonde l’école de Droit. De nombreuses révoltes ont lieu sous son gouvernement. Il démissionne, le 13 mars 1867 et part pour la Jamaïque.
Le 14 juin1867, Sylvain Salnave est élu président d’Haïti pour quatre ans. Salnave entreprend de reconquérir le sud entre 1868 et 1869. Arrêté, il compare devant le tribunal révolutionnaire de Port-au-prince qui le condamne à mort pou violation de la constitution. Il est fusillé le 15 janvier 1870. Pendant le gouvernement de Salnave, le pays est en guerre. Haïti devient l’un des Etats les plus pauvres du monde.
Entre 1870 et 1915, seize présidents se succèdent ajoutant chacun leurs lots de chaos.
L’assassinat du président Jean Vilbrun Guillaume le 27 juillet 1915 change la donne. Un projet de convention entre Haïti et les Etats-Unis est remis au président Sudre Dartiguenave élu le 12 août 1915. La convention est votée le 16 septembre 1915 par la chambre des députés et le 12 novembre par le sénat. Cette convention engage les Etats-Unis à maintenir l’ordre dans le pays et à établir les finances d’Haïti. Les Etats-Unis prennent la direction de la gendarmerie, du service d’hygiène, des travaux publics et contrôlent les finances nationales. Ce protectorat américain prend fin avec la cérémonie du 21 août 1934 où le drapeau bicolore national flotte de nouveau sur les casernes Dessalines. Le président haïtien Sténio Vincent prononce alors ce discours : « Que désormais à cette occasion, il soit l’emblème respecté d’une petite Nation ayant la volonté de vivre dans la liberté par l’ordre et dans le travail sous l’égide salutaire de la paix publique ».


Empire d’Haïti (1864-1986)












En 1957, le médecin François Duvalier prend le pouvoir. Son surnom est «Papa Doc.». Le duvaliérisme est marqué par une dictature violente. La démocratie s’efface avec la mise en place d’une garde personnelle, appelée « Tontons Macoutes » qui font régner la terreur sur l’île avec leurs machettes. En 1961, François Duvalier se fait réélire et proclame en 1964 une nouvelle constitution qui le désigne président à vie. Les meurtres d’opposants se multiplient. Il utilise le concept de négritude afin de persécuter les métis. En 1962, il fait adopter un drapeau bicolore noir et rouge, les armes sont composées d’un palmier surmonté par le bonnet phrygien de la liberté et orné de trophées.
Cette dictature dure jusqu’à la mort de François Duvalier en 1971. Son fils Jean-Claude, âgé de dix-neuf ans, lui succède comme président à vie. Il tente de donner une nouvelle image à son régime dictatorial, afin de favoriser les investissements étrangers. Les Haïtiens fuient le pays par tous les moyens au péril de leur vie.
En 1984, des émeutes éclatent entraînant Haïti dans le chaos. En novembre 1985, une manifestation de la jeunesse est sauvagement réprimée. En février 1986, des révoltes agitent les villes haïtiennes. Jean-Claude Duvalier s’enfuie en France le 7 février 1986.


Empire d’Haïti (depuis 1986)

Le 17 février 1986, la nation reprend le drapeau bicolore qui est ratifié lors du plébiscite de la constitution de 1987, deux bandes d’étoffe d’égale dimensions : l’une bleue en haut, l’autre rouge en bas, placées horizontalement ; au centre, sur un carré d’étoffe blanche, sont disposées les armes de la République.
Les couleurs bleu et rouge sont reprises du drapeau tricolore français et représentent l’union des Noirs et des Mulâtres. Les armes de la République sont : le palmiste surmonté du bonnet phrygien de la liberté et ombrageant de ses palmes un trophée d’armes (fusils, drapeaux, hachettes, canons, boulets de canon, trompettes, ancre, etc.) avec la légende « L’union fait la force ».
Après une période de transition difficile, le père Jean-Bertrand Aristide, adepte de la théologie de la libération, est élu à la présidence en 1991, avant d’en être écarté par un coup d’Etat militaire. Haïti sombre alors dans le plus grand chaos. Le 19 septembre 1994, les marines américains débarquent à Port-au-Prince Les militaires putschistes et les paramilitaires s’enfuient sans résistance. Le 15 décembre 1995, René Préval lui succède. Puis, le 26 novembre 2000 Jean-Bertrand Aristide est élu pour un deuxième mandat de cinq ans. Des fraudes massives sont dénoncées lors de ces élections. En janvier 2004, le bicentenaire de l’Indépendance est gâché par la guerre entre bandes rebelles et la police soutenue par les chimères. Le 20 février 2004, les Etats-Unis réclament la formation d’un nouveau gouvernement avec l’opposition pour sortir de l’impasse. Le 29 février 2004, le président Aristide est chassé du pouvoir, il part dans un avion américain. Après le report des élections en Haïti à de multiples reprises René Préval est élu pour un second mandat en mars 2006.


Lunise Marquis

Née en 1979 dans le nord d’Haïti, Lunise Marquis a obtenu une maîtrise d’Histoire à Paris I Panthéon Sorbonne. Son sujet de mémoire porte sur l’image du Noir dans le roman policier américain des années 1950 à nos jours


Bibliographie

Barros (Jacques), Haïti de 1804 à nos jours, Harmattan, Paris, 1994


Sitoilographie

www.haïti-reference.com/
histoire/symboles/drapeau.html